Il y avait longtemps que je n’ avais pas présenté un livre et celui-ci est un vrai coup de coeur. Parmi la jungle de tous les ouvrages qui paraissent sur le jardinage et les plantes, bien peu présentent un véritable intérêt. Ce n’ est pas le cas de cet ouvrage de Jean Michel Groult, Pour un nouvel exotisme au jardin, qui suscite une profonde réflexion sur notre relation aux végétaux exotiques, au jardin et plus globalement au monde.
Cet attrait pour l’ exotisme dont on peut supposer qu’ il n’ est pas inné en nous remonte à la fin du Moyen Age avec les premières explorations. Si la quête de l’ ailleurs, de l’ exotisme qui selon Bertrand Levy ‘présuppose une dose de confiance, de bienveillance et de curiosité pour l’ autre et le différent’ a permis à l’ Europe de s’ ouvrir sur le reste du monde, la noblesse de la démarche a vite cédé le pas à la rapacité face à des intérêts commerciaux évidents, au pillage systématique des richesses nouvellement découvertes, puis à la colonisation qui s’en est ensuivie.
Loin des clichés touristiques la plante exotique traîne un lourd passé derrière elle.
La découverte de nouveaux horizons a fait évoluer notre conception du jardin. Du jardin médiéval enclos, renfermé sur lui-même, l’ hortus conclusus, nous sommes passés au jardin cosmopolite où se côtoient des plantes originaires de tous les continents, une invitation au voyage immobile. Les plantes exotiques qui dans le passé étaient réservées à une élite fortunée se sont démocratisées et sont à présent accessibles à tous. Cet engouement a malheureusement pour conséquence le risque de raréfaction pour certaines espèces prélevées dans la nature car leur développement trop lent les rendraient trop couteuses à produire en culture, on pensera par exemple aux plantes à caudex. L’ introduction de plantes exotiques peut également faire encourir un danger pour nos espèces indigènes au cas où elles viendraient à s’ échapper des jardins et à se montrer invasives.
Face à ces enjeux écologiques quel est l’ avenir des plantes exotiques dans nos jardins ? Cette quête passionnée et parfois déraisonnable quand elle traduit par le déploiement de moyens disproportionnés pour maintenir péniblement en vie certaines exotiques en dépit d’ un climat manifestement défavorable est-elle tenable à long terme ? Et puis ne risque t-on pas d’ assister à une standardisation des jardins dont le déjà classique trio palmier phormium et olivier est un funeste présage ? Trop d’ exotisme tue l’ exotisme et au train où vont les choses la présence d’ un noisetier ou d’ un sureau dans nos jardins fera bientôt figure d’ incongruité. Déjà dans les jardineries, les végétaux considérés comme gélifs représentent la moitié des plantes mises en vente, ce qui est proprement ahurissant dans un pays au climat tempéré. Pourtant il existe quantité de plantes pouvant être qualifiées d’ exotiques en raison de leur origine géographique éloignée qui se montrent rustiques sous notre climat.
Ceci signifie t-il pour autant que nous devions renoncer au jardin exotique parce qu’il serait un luxe trop couteux au regard de notre environnement ? Non car notre besoin de rêve et d’ évasion seront toujours plus forts, mais le jardin exotique de demain sera forcément différent. Pour découvrir les 7 chemins imaginés par Jean Michel groult qui y mènent, je vous invite à lire ce livre passionnant et rempli d’ humour.